Nous avons commencé les répétitions de L’Orestie d’Eschyle, mise en scène par David Géry, le 1er octobre 2007.
Celui-ci (ainsi que Laura Koffler) m’avait choisie pour y interpréter le rôle de Cassandre aux côtés de Yann Collette (Apollon), Maurice Bénichou (Agamemnon), Caroline Chaniolleau (Clytemnestre), ainsi que 11 autres acteurs dont Sylvain Dieuaide qui jouait Oreste.
Deux mois intenses de répétitions au théâtre de la Commune d’Aubervilliers m’ont fait découvrir un rôle incroyablement difficile sur lequel je ne pensais pas pouvoir quelque chose. Comparable en cela, en sa logique intérieure, à l’Ophélie de Shakespeare.
Cassandre, prophétesse aimée d’Apollon, mais qui se refusant à lui se voit damnée par le dieu – à cause même de ce refus. Sa damnation, sa tragédie : personne ne croira jamais ses prophéties, celles-ci pourtant toujours vraies et justes. Cassandre annonce, dès Agamemnon, la tragédie des Atrides, et les deux pièces futures. Elle annonce la tragédie en mourant de la main même d’Apollon. Chaque prophétie la tue à petit feu. Sa résistance et sa lucidité la tuent pour toujours. Mais la tragédie arrive tout de même.
Sacrifiée intemporelle du Dieu, passion malgré elle du Dieu : elle est l’incarnation du souffle divin qui malgré elle s’exprime, s’exprimera et finira par la tuer. Victime d’une forme de cruauté d’Apollon.
L’exploitation du spectacle a eu lieu du 28 novembre au 21 décembre au théâtre de la commune.
Comme pour Le Viol de Lucrèce, la rencontre avec Cassandre fût pour moi un moment fébrile mais très puissant où le travail prévalait sur tout.
J’étais si heureuse de travailler ce rôle chaque soir, gardant en tête les précieux conseils de Nicolas Vladyslav (danseur et chorégraphe de Sidi Larbi Cherkaoui notamment) avec qui Yann et moi avions préparé cette longue scène d’ultime prophétie, et de mort.
Encore un bonheur scénique de plus. Yann et moi, nous nous retrouvions comme des enfants à jouer cette scène toute en sensualité un peu sauvage et en souffrance du verbe prophétique. Les cris, les larmes, la joie de jouer et la joie intense d’être si bien accompagnée sur la scène : je suis sortie de ces trois semaines de jeu plus remplie que jamais d’un rôle incandescent.
Ce métier parfois permet de telles rencontres avec lesquelles je grandis et qui me constituent si fort qu’après coup je me sens vide et esseulée.

L’Orestie d’Eschyle
mise en scène de David Géry
Théâtre de la Commune, Aubervilliers
Octobre – fin décembre 2007

Voici une petite revue de presse de L’Orestie , mise en scène par David Géry:

http://www.lemonde.fr/culture/article/2007/12/10/l-orestie-d-eschyle-un-precis-de-democratie-pour-aujourd-hui_987857_3246.html

http://www.journal-laterrasse.fr/lorestie-2/

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